Sept leçons pratiques tirées de plus de 150 projets d’IA
Publié le 12/05/2025 dans Paroles d'experts
Le déploiement de l’IA reste souvent un parcours semé d’embûches. Les organisations qui veulent réussir doivent pouvoir aller au-delà des idées reçues. Les experts Benoît Hespel et Dirk Luyckx partagent les 7 leçons clés tirées de plus de 150 projets d’IA.
L’immense potentiel de l’IA n’est plus à démontrer. Par contre, transposer ce potentiel dans la pratique, c’est une autre histoire. De nombreuses entreprises se heurtent à des obstacles, qu’il s’agisse de problèmes liés aux données, d’un retour sur investissement peu clair ou de résistances lors de la mise en œuvre. La théorie est présente en abondance, mais ce qui manque le plus souvent, c’est une véritable expérience pratique. Aujourd’hui, Proximus NXT est en mesure de fournir cette expérience. À ce jour, son compteur affiche plus de 150 projets d’IA qui ont permis de tirer sept grandes leçons.
Si les attentes autour d’un trajet d’IA ne sont pas définies avec précision, le projet échoue avant même d’avoir commencé.
Benoît Hespel, Head of AI chez Proximus ADA
1. Commencez par le problème, pas par le modèle
“Nous avons connu la même situation en 2018”, déclare Benoît Hespel, Head of AI chez Proximus ADA . “Tout le monde a voulu déployer des réseaux neuronaux, même s’ils n’étaient pas la solution idéale pour un projet spécifique.” La technologie pour la technologie n’est jamais le meilleur point de départ.
C’est pourtant ce qui se passe aujourd’hui avec les LLM et les agents d’IA. “Les entreprises ne veulent pas être à la traîne. Souvent, elles souhaitent ‘intégrer l’IA dans leurs processus’ sans partir d’un problème concret”, explique Dirk Luyckx, CTO chez Codit . “Nous devons alors revenir ensemble à l’essence même de la démarche, qui est de savoir ce qu’elles souhaitent résoudre exactement.”
Un trajet d’IA digne d’intérêt commence par une problématique commerciale claire, et non par une préférence pour une technologie particulière. Mieux vaut travailler sur la base d’une feuille de route, en convertissant les idées en cas d’utilisation réalisables assortis d’un impact.
2. Voyez grand, mais travaillez avec des points de mesure concrets
“Il est bien entendu crucial d’avoir de l’ambition, mais il faut aussi savoir la diviser en plusieurs étapes réalisables. Dire que l’on veut ‘améliorer l’efficacité du réseau’ est trop vague”, précise Benoît Hespel. “Qu’est-ce que cela implique concrètement ? Quels sont les KPI que vous souhaitez améliorer et dans quelle mesure ?” En l’absence de cadre de mesure clair, on assiste à d’innombrables itérations sans prise de décision. “Dans ce domaine, vous devez faire preuve d’une grande rigueur. Si les attentes ne sont pas définies avec précision, le projet échoue avant même d’avoir commencé.”

Benoît Hespel
Head of AI chez Proximus ADA
3. Pas de valeur sans données de qualité
“L’intelligence de l’IA ne tombe pas du ciel”, affirme Dirk Luyckx. “Vous avez besoin de données, et elles doivent être utilisables, disponibles et correctes.” Trop souvent, au début d’un projet, il s’avère que les étiquettes nécessaires sont manquantes. Ou que les données que les équipes pensaient avoir sont inutilisables dans la pratique. “Vous devez évaluer objectivement la maturité de vos données”, souligne Benoît Hespel. “Sans gouvernance, et sans compréhension de la propriété et de la confidentialité des données, vous vous retrouverez inévitablement dans une impasse.”
Souvent, l’intégration technique est une autre source de difficultés. “Les données sont cantonnées dans des silos”, poursuit Dirk Luyckx. “Il faut briser ces silos et faire fonctionner les données ensemble. L’intégration nécessite plus que le ‘simple’ acheminement des données. Elle exige de la cohérence et un alignement sémantique, généralement assortis d’accords organisationnels.”
4. Composez une équipe aux compétences multiples
L’IA nécessite une approche pluridisciplinaire. Selon Benoît Hespel, la plus grande erreur que les organisations commettent est de penser qu’un data scientist et un ingénieur de données feront l’affaire. Il est important d’impliquer d’autres parties prenantes de l’entreprise, comme des experts du domaine, des architectes IT et des traducteurs analytiques (AI Business Analyst). Ce dernier groupe est essentiel pour faire le lien entre les attentes de l’entreprise et les modèles techniques.
Dirk Luyckx confirme : “L’équipe doit penser à l’acceptation de la technologie dès le premier jour. Il ne s’agit pas seulement de construire le modèle, mais aussi de l’expliquer, de le motiver et d’accompagner le projet. Sinon, il rencontre inévitablement des résistances.” L’IA est source de changement, et le changement ne peut réussir que s’il est accueilli favorablement.

Dirk Luyckx
CTO chez Codit
5. Construisez une solution évolutive, en gardant toujours l’objectif final à l’esprit
“Développer un prototype ou ‘proof of concept’ est une chose”, déclare Dirk Luyckx. “La mise à l’échelle de la solution en est déjà une tout autre.” Souvent, un modèle repose sur un jeu limité de données, sans tenir compte d’un traitement en temps réel, de l’intégration ou de la maintenance. “Un modèle construit de la sorte fonctionne bien pendant la phase de test, mais il ne tient pas la route lorsqu’il est déployé à plus grande échelle.”
Pour Benoît Hespel, la clé réside dans la préparation. “Dès le départ, réfléchissez à la situation finale que vous envisagez. Si vous souhaitez travailler avec des applications en temps réel, l’infrastructure et les flux de données doivent être préparés en conséquence. Sinon, vous devrez repartir de zéro.” Vous songez à élaborer un POC ‘et après on verra’ ? D’après les experts, ce n’est pas la meilleure approche. “Travaillez en tenant compte de l’objectif global.”
6. Ne négligez jamais les implications éthiques
Lorsqu’il est question d’IA, l’éthique n’est jamais une étape facultative. “L’IA est fondamentalement différente des applications informatiques classiques”, explique Dirk Luyckx. “Le résultat d’une requête adressée à un LLM évolue au fil du temps, même si l’invite reste inchangée.” Il est donc indispensable de surveiller les risques associés. “Pour ce faire, nous utilisons des outils axés sur la sécurité du contenu, la détection des biais et la dérive du modèle”, précise Dirk Luyckx.
L’intention qui sous-tend l’utilisation d’un modèle d’IA est importante elle aussi. Benoît Hespel : “D’un point de vue éthique, une même technologie peut être utilisée tantôt de manière acceptable, tantôt de manière inacceptable. L’analyse des sentiments, par exemple, ne pose aucun problème lorsqu’elle est utilisée pour produire des rapports génériques de tendances. Mais son utilisation deviendrait douteuse si elle servait à évaluer des collaborateurs de façon individuelle. Il est donc nécessaire d’assurer un suivi pour maintenir la conformité au cadre légal.”
Un projet d’IA ne s’arrête pas à son déploiement. C’est seulement là qu’il commence.
Dirk Luyckx, CTO chez Codit
7. L’IA évolue à l’infini
Les systèmes d’IA vieillissent. Les données changent, les comportements évoluent et les performances diminuent. “Pourtant, les projets d’IA ne sont que rarement assortis d’un budget pour le suivi”, constate Benoît Hespel. “Sans surveillance, vous n’aurez aucune idée de la dégradation de la solution, et sans mises à jour, sa pertinence ne durera pas.” L’acceptation du système est également amenée à disparaître si l’application ne bénéficie pas du support requis après sa mise en service.
La solution ? “Considérez le support comme la prolongation de la phase de développement”, propose Dirk Luyckx. “Cela permet à l’équipe de rester activement impliquée et vous disposez d’une marge de manœuvre pour le retour d’information et la poursuite de l’optimisation. C’est une autre leçon importante : un projet d’IA ne s’arrête pas à son déploiement. C’est seulement alors qu’il commence réellement.” Il faut en tenir compte pour le trajet dans son ensemble, mais aussi dans le budget.
Conclusion : la pratique plutôt que la théorie
La plus grande valeur de l’IA réside dans son application, mais c’est précisément là que, trop souvent, le projet échoue. Seule, la technologie ne suffit pas. Les entreprises doivent aussi prêter attention à la gouvernance, à l’évolutivité, à l’éthique et à l’acceptation dans le cadre de leur trajet. Et surtout, lorsqu’on se lance dans l’aventure de l’IA, il faut continuer à apprendre. “L’expérience fait toute la différence”, conclut Benoît Hespel. “Non seulement pour éviter les erreurs, mais aussi pour s’améliorer. Chaque cas d’utilisation affine votre approche.”
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Benoit Hespel et Dirk Luyckx
Benoît Hespel est Head of AI chez Proximus ADA, le centre d’expertise de Proximus en matière d’IA et de cybersécurité. Il gère et coordonne le développement et le déploiement de solutions d’IA pour les clients internes et externes.
Dirk Luyckx est CTO chez Codit, l’une des filiales de Proximus NXT, et expert dans la conception, le développement et la gestion de solutions cloud-natives basées sur les données. Il vous fait profiter de plus de 20 ans d’expérience dans le développement de logiciels, avec une spécialisation dans les produits de Microsoft, le cloud et les questions d’intégration.