Comment le Covid-19 a bénéficié au sim racing

De Proximus

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La crise sanitaire connait une seconde vague encore plus virulente que la première dans nos contrées. Bien que chacun puisse être inquiet quant à l’évolution de la situation, cette pandémie n’a étonnamment pas que des effets négatifs. Parmi les secteurs qui ont particulièrement bénéficié de cette crise, celui du sim racing, qui a vu sa popularité grimper en flèche.

Lorsque l’on parle d’e-sport, les premiers jeux qui viennent à l’esprit sont souvent League of Legends, Counter-Strike ou encore Dota. Ce sont des titres dotés de mécaniques profondes et variées, avec un souci tout particulier de la mise en place d’éléments stratégiques pour vaincre l’adversaire. La communication y est essentielle, de même que l’esprit d’équipe. De plus, ce sont des jeux sur lesquels le joueur expérimente un sentiment jouissif de supériorité lorsqu’il défait son adversaire. Ils sont également abordables, aussi bien dans leur approche qu’en termes financiers.

Le sim racing, un genre à part

De l’autre côté de ce spectre se trouve la catégorie du sim racing. Ces jeux s’adressent à une niche de personnes souvent déjà passionnées par les sports moteurs à la base. Des titres comme iRacing, Raceroom, rFactor2 ou encore Assetto Corsa proposent tous la même chose, mais sous des habillages différents: restituer une expérience de conduite aussi fidèle que possible à celle vécue par les vrais pilotes de course. En pratique, ces « jeux » sont de véritables simulations automobiles où les développeurs codent la physique des véhicules sur base de données chiffrées et récoltées auprès d’équipes professionnelles. Certains studios collaborent même avec les pilotes afin de recueillir leur ressenti et ajuster les paramètres en fonction de leurs retours.

De ce fait, et pour profiter de l’expérience complète, les amateurs de sim racing investissent souvent dans un setup au minimum composé d’un volant et d’un pédalier, l’ensemble pouvant être très onéreux selon la gamme choisie. D’un point de vue extérieur, le tout peut donc sembler rébarbatif pour le profane qui cherche tout simplement à s’amuser au volant de bolides sur les plus beaux circuits du monde.

Exemple d’installation avec celle de Lando Norris © Motorsport Images

Pourtant, le genre s’est constitué une solide communauté au fil des ans et compte aujourd’hui un circuit compétitif en pleine expansion.

Romain Grosjean, nouvel ambassadeur de la discipline

Romain Grosjean, auteur de dix podiums en F1 © Haas F1-Team

Preuve d’un intérêt déjà bien présent, certains pilotes professionnels participent régulièrement à différents championnats virtuels, comme Max Verstappen ou Lando Norris. D’autres ont même franchi le pas et ont fondé leur propre structure e-sportive. Parmi eux, le pilote de F1 Romain Grosjean a lancé son équipe R8G Esports Team en avril dernier.

« Je m’intéressais à l’e-sport depuis un bon moment, mais le premier confinement a accéléré les choses », nous explique-t-il entre deux Grands Prix.

“J’avais envie d’essayer de trouver un moyen d’ouvrir mon sport (la Formule 1, ndlr) qui est compliqué d’accès et très onéreux et de développer une solution pour découvrir des jeunes talents. Avec R8G, j’espère pouvoir créer un pont entre le virtuel et le réel.”

© R8G Esports Team

Il faut dire que si ce pont existe déjà avec des exemples comme Igor Fraga qui pilote désormais en Formule 3 après avoir fait ses armes sur Gran Turismo, il reste cependant très rare. Néanmoins, le sim racing présente l’avantage de réunir les pilotes réels et virtuels et brise la barrière qui peut exister au sein des compétitions officielles de sports moteurs.

“C’est compliqué d’affronter un Max Verstappen sur une piste réelle. Cependant en sim racing, c’est tout à fait possible pour un pilote « amateur » de rouler contre lui.”

Le coup de projecteur Covid-19

Comme évoqué en préambule à cet article, la crise sanitaire actuelle a étonnamment eu des effets positifs sur certains secteurs, notamment celui du numérique. La mise en place de plateformes digitales par les entreprises pour favoriser le télétravail et, globalement, repenser la façon d’évoluer à distance, a clairement démontré une accélération de cette transition digitale, dont le marché ne s’est jamais mieux porté que maintenant.

Quand le premier « lockdown » est entré en vigueur en mars dernier, les sports moteurs n’ont pas échappé à la règle et les pilotes ont dû trouver de quoi s’occuper dans l’attente de pouvoir reprendre la piste. En ce sens, beaucoup d’entre-eux se sont lancés dans le streaming afin de diffuser leurs courses virtuelles. Les figures les plus connues sont souvent des pilotes de F1 comme Lando Norris ou Charles Leclerc, qui ont rassemblé des dizaines de milliers de spectateurs à chacun de leur live. Le tout a accéléré l’exposition médiatique du sim racing, et a permis à un public peut-être pas forcément familier avec la discipline de s’y intéresser davantage.

« Je pense qu’il y a clairement eu un impact positif du Covid sur le sim racing », confirme Romain Grosjean. « Le meilleur exemple qu’on a, ce sont les 24h virtuelles du Mans qui ont été un véritable succès ».

En effet, cette première édition virtuelle de la course mythique d’endurance a rassemblé pas moins de 63 millions de spectateurs en audiences cumulées (TV et digitale) sur le weekend des 13 et 14 juin 2020. Un record sans précédent pour le sim racing. De fait, la course rassemblait de grands noms comme Fernando Alonso, Juan Pablo Montoya ou encore Jenson Button et proposait l’un des plateaux les plus relevés de l’histoire de l’épreuve.

L’équipe R8G a terminé troisième de sa catégorie (GTE) lors de ces 24h virtuels.

Outre Le Mans, d’autres catégories ont profité du Covid-19 pour transférer leur championnat en mode virtuel. La Formule E en est un parfait exemple, puisque l’ensemble des pilotes officiels se sont affrontés lors du « Race At Home Challenge ». C’est notre compatriote Stoffel Vandoorne qui s’était d’ailleurs imposé au terme d’une série palpitante.

De là à affirmer qu’il existe une prise de conscience des organisateurs concernant l’apport du sim racing à la discipline en général, Romain Grosjean relativise.

« Je ne sais pas si on peut parler de prise de conscience mais, en tout cas, c’est clair qu’on a aujourd’hui les moyens d’organiser des courses extrêmement réalistes”, explique le pilote Haas. “Quand je pense aux 24h, c’était la première fois que ça arrivait et cela a été un succès total. Avec l’hiver qui approche, il faut espérer que d’autres événements de ce type auront lieu”.

S’il faut reconnaitre un avantage au sim racing par rapport à la course réelle, c’est de proposer des courses souvent très serrées, au contraire de championnats officiels comme la Formule 1 où certaines équipes dominent la compétition sans le moindre suspense. « Ce qu’on voit en e-sport, c’est top. Ce sont des bagarres roues dans roues jusqu’à la fin et il y a du respect entre joueurs. Mais c’est compliqué à mettre en place dans des courses non-officielles. Par exemple sur iRacing, ça arrive souvent de se faire couper en deux par un retardataire, donc il faudrait essayer de trouver un système pour régler ce problème. Mais clairement, le spectacle proposé en virtuel est génial ».

Le virtuel au service du réel

Une autre raison de ce succès à envisager est la proximité qu’il existe désormais entre l’expérience virtuelle et celle du réelle. Nous l’évoquions dans ces lignes, les jeux de sim racing sont avant tout des simulations qui tentent de retranscrire le plus fidèlement possible les sensations de pilotage telles que vécues par les pilotes des différents championnats. De ce fait, la frontière entre les deux mondes est devenue extrêmement fine, au point où les professionnels utilisent certaines connaissances acquises lors de leurs sessions sur rFactor 2 ou iRacing en conditions réelles.

© Haas F1-Team

« Il y a des petits trucs qu’on voit en sim racing qu’on est capable de répéter en vrai une fois sur la piste », confie le français.

« Par exemple lorsqu’on a été au Grand Prix F1 du Nürburgring en Allemagne, j’avais fait ma première compétition officielle sur iRacing avec une BMW sur ce circuit et je savais qu’on pouvait avoir énormément de vitesse dans le cinquième virage en gardant un filet de frein. Et du coup en arrivant sur le circuit, j’ai reproduit ça et ça a fonctionné. Les données virtuelles sont de plus en plus proches de la réalité. Mais il y a des choses qui restent encore limitées, comme le modèle pneumatique. C’est pour ça que les sim racers par exemple roulent plus vite d’une demi-seconde, voire d’une seconde, que moi car ils savent où ils peuvent freiner plus tard, etc ».

Ce rapport étroit entre réel et virtuel permet donc aux pilotes de continuer à pratiquer leur sport de manière technique et explique également pourquoi bon nombre d’entre eux se livrent au sim racing.

Des constructeurs encore méfiants

Nous l’avons vu, la crise du covid semble avoir pleinement profité au sim racing. Certains constructeurs n’hésitent d’ailleurs pas à investir en la matière, comme Porsche qui organise la troisième saison de la PESC en janvier sur iRacing, avec un cashprize de 250.000$. Néanmoins, il s’agit encore d’une exception à la règle.

© iRacing

Journaliste spécialisé en sports moteurs et responsable communication chez R8G depuis quelques mois, Thibault Larue analyse le phénomène comme suit:

“Les constructeurs regardent ça d’une façon encore assez méfiante. Une des raisons à cela, c’est qu’ils ont peur que le transfert du réel vers le virtuel ait lieu et que leur milieu s’écroule, ce que l’on peut comprendre. Les constructeurs aiment bien tout contrôler et débarquer avec quinze ingénieurs sur une course. Mais en sim racing, ça ne sert à rien. Si on regarde Audi par exemple, ils n’ont presque plus de sport automobile à part la Formule E. Ils ont organisé une compétition e-sport avec Mike Rockenfeller (pilote DTM, ndlr), mais juste dans leur coin, ils hésitent encore. Il n’y a pas encore de véritable structure et je pense qu’on est dans une transition qui va encore prendre du temps pour se concrétiser“.

Néanmoins, attirer ces mêmes constructeurs fait partie des ambitions de R8G Esports et de son fondateur.

Arriver dans le sim racing n’est pas simple, il y a beaucoup de jeux et de plateformes différentes et on ne sait pas toujours où trouver les pilotes. Trouver un constructeur avec qui travailler et proposer quelque chose clé en main, c’est une idée qu’on a pour le futur. On a le savoir-faire, les pilotes et la rapidité. Maintenant, notre rôle est aussi de professionnaliser au maximum la discipline et donc d’aider ces constructeurs“, conclut Romain Grosjean.

En définitive, la crise sanitaire a été une belle vitrine pour le milieu du sim racing. Le public a pu découvrir cette discipline par le biais de streams réalisés par des personnalités fédératrices et d’événements réussis comme les 24h virtuelles du Mans. Il voit aussi la création d’équipes chapeautées par des pilotes professionnels comme Romain Grosjean ou encore Fernando Alonso (FA Racing Esports). Si le sim racing possédait déjà une communauté fidèle et investie, il a vu son développement s’accroitre de façon exponentielle au cours des derniers mois. Et nul doutes que son avenir s’annonce radieux.

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