Rencontre avec Patrick Bruel pour 'Un sac de billes'

Cinéma | Un rôle tout en retenue dont il nous parle dans ce dossier.

De Pickx

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Acteur et chanteur, Patrick Bruel mène une double carrière dès ses débuts sur les devants de la scène. Depuis son premier rôle au cinéma en 1979 dans Le Coup de sirocco, d'Alexandre Arcady, il multiplie les succès à l'écran.

Un sac de billes, adapté du roman culte de Joseph Joffo, est maintenant disponible dans le catalogue à la demande de Proximus TV. Il incarne avec poigne le père de l'auteur, qui a poussé ses deux jeunes garçons à traverser seuls la France occupée, afin de sauver leur peau. Un rôle tout en retenue dont il nous parle dans ce dossier.

Interview de Pauline De Beule pour Proximus TV.

"Si vous abordez le nazisme aujourdhui, il faut que ce soit mieux que bien"

Qu’est-ce qui vous a convaincu dans ce projet de film, qui est une seconde adaptation du livre éponyme de Joseph Joffo ?

Patrick Bruel : "Il y avait deux questions quant à l'intérêt de ce projet. D'abord, le film avait déjà été fait, mais si vous ressortez Un sac de billes de Jacques Doillon aujourd'hui, personne n’en parlera. À partir du moment où l’on veut remettre en perspective la plus grande tragédie du 20ème siècle, on doit prendre un éclairage nouveau. Pour parler à de jeunes générations qui arrivent dans l’âge de l’oubli, il faut un projet lumineux et moderne.

Ensuite, il fallait que les enfants soient exceptionnels. Sans cela, je n’y serais pas allé. Quand j'ai découvert leurs essais, il ne m’a pas fallu deux minutes pour adhérer à cette aventure. L’intérêt du film est qu'il traite ce sujet par le prisme des enfants. Depuis Au revoir les enfants de Louis Malle, je n’en ai pas vu d’aussi fort."

"Il n’y a aucune raison de choisir, tant que le public me suit sur scène et à l'écran"

On vous connaît d’abord en tant que chanteur, mais vous faites du cinéma depuis vos premiers succès sur scène. C'est la notoriété qui vous y a mené ?

Patrick Bruel : "C’est très complémentaire, la chanson et le cinéma, car l’un nourrit l’autre. Je m’en voudrais de ne pas vivre ce que je vis en ce moment avec ce film, comme je m’en voudrais de ne pas vivre ce qu’il se passe sur scène. C’est un grand privilège.
Mais je dois faire attention à bien choisir les choses, car cela n’a pas toujours été le cas sur mes rôles précédents. J’ai choisi le très réussi Le Prénom... Puis le moins réussi Tu veux ou tu veux pas ?, avec Sophie Marceau. C'était mauvais. Et dans mon cas, cela pardonne moins que pour un acteur qui fait cinq films par an.

En l’occurrence, quand un sujet comme Un sac de billes se présente, avec la bienveillance de ce metteur en scène (Christian Duguay, ndlr), sa justesse, son implication, et puis un beau casting, cela ne se refuse pas. J’ai d'abord pensé que c’était un rôle très secondaire, sans imaginer que le rôle prendrait une place aussi centrale."

"Le plateau entier était complètement bouleversé"

En quelques scènes seulement, comment parvient-on à être aussi crédibles dans l’émotion, avec deux jeunes enfants ?

Patrick Bruel : "Ce n’était pas très difficile de me plonger dans les scènes les plus denses de ce film, parce qu'on les a tournées entre le 16 et le 20 novembres 2015, soit trois jours après les attentats de Paris. Trois jours après avoir pris mes enfants dans les bras pour les rassurer, leur expliquer l’inexplicable, calmer la peur qu’ils avaient eue. Le soir du drame, ils étaient au stade (de France, ndlr). Je leur ai dit que si un jour quelqu’un entrait dans leur classe, ils ne devaient pas dire qu'ils étaient juifs. Des choses que je ne pensais jamais avoir à dire à mes enfants.

Et trois jours plus tard, on se retrouve en 1942 sur le tournage, et je répète cela à deux gamins, pour sauver leur vie dans la nuit. Avouez que l’on n’avait pas besoin d’aller chercher une émotion à la Stanislavski !"

L'auteur Joseph Joffo vous a-t-il orienté pour incarner le personnage de son père ?

Patrick Bruel : "Sur le plateau, il m’a orienté par sa présence. De cet œil bleu, que j’avais envie de voir briller, en incarnant le père qu’il avait idéalisé. C’est bouleversant de se remémorer grâce à ce film par quoi il est passé, puis d'être face à Joseph aujourd’hui. Quand j’y pense, forcément j’ai les larmes aux yeux. Parce que je pense à mes fils. Au petit surtout, qui a exactement l’âge de Jo au moment du tournage."

"On a des parallèles qui sont plus que troublants"

Ce film d’époque résonne malheureusement avec l’actualité, on pense à la montée de l'extrême droite notamment...

Patrick Bruel : "Le film vient nous chercher de manière très forte aujourd'hui parce qu'il ouvre le débat sur le racisme, sur l’exclusion des enfants, sur les amalgames, sur ces petits Musulmans qui se sentent regardés avec méfiance à l'école, sous prétexte qu’ils portent le fardeau des abominations de terroristes.

C’est troublant parce que d’un côté on rentre dans la période où l’on va commencer à oublier, et en même temps on est dans un éternel recommencement. On a la crise de 1929 et ses conséquences, la crise de 2008 et ses conséquences. La montée du nationalisme, des discours populistes, la montée du repli sur soi. Et il y a encore des gens qui ont l’irresponsabilité de vouloir sortir de l’Europe, pour des raisons économiques. L’Europe, qui a été créée pour être le garant de la paix. Cela fait 70 ans qu’il n’y a pas eu de guerre, parce ce qu’il y a l’Europe."

"J’ai grandi dans un univers très engagé"

Cela fait partie des motivations de votre vie d’acteur, de rester éclectique grâce à des films porteurs d’un message ?

Patrick Bruel : "C’est ma motivation dans ma vie d’homme, dans ma vie de citoyen. Durant mon adolescence, j'ai fréquenté le lycée le plus politisé de France, Henry IV, qui était le premier à lancer les mouvements étudiants. De par mon éducation, mes études et mon intérêt pour les sciences politiques, je peux avoir une analyse globale, à la fois politique et géopolitique de la situation.

Aujourd'hui, cela m’intéresse d’analyser ce qui peut se passer, à la veille d’une échéance électorale très importante en France et au lendemain d’une élection inquiétante de l’autre côté de l’Atlantique.

"J’ai pensé tout de suite à Patrick Bruel"

Christian Duguay : "C’est l’artiste qui m’intéresse, pas une référence à un personnage qu’il avait déjà joué. J’ai attendu la bonne opportunité pour lui montrer, avec tous les arguments pour aller le chercher, parce que je savais qu'il était crucial. Il n’y a pas un jour avec lui où l'on apprend pas quelque chose. Il partage ses idées sans les imposer. Sans le moindre nombrilisme et aucune vanité.

Ses scènes sont marquantes et capitales. Ce père a la bienveillance, malgré lui, de mettre une baffe à son enfant pour lui apprendre à ne pas révéler qu’il est juif. Et cela va lui sauver la vie plus tard. Quand on a une scène comme celle-là dans le livre, on ne peut pas juste faire un film sur Joseph Joffo, il faut le faire sur son rapport avec son père."



Un sac de billes, de Christian Duguay, avec Patrick Bruel, Elsa Zylberstein, Dorian Le Clech et Batyste Fleurial, est actuellement disponible dans le catalogue à la demande de Proximus TV.

Patrick Bruel et ses fans

Suite à leur participation au concours Un sac de billes, organisé sur notre site Proximus TV, deux fans de Patrick Bruel l'ont rencontré à l'occasion de cette interview.


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Attention : regarder la télévision peut freiner le développement des enfants de moins de 3 ans, même lorsqu’il s’agit de programmes qui s’adressent spécifiquement à eux. Plusieurs troubles du développement ont été scientifiquement observés tels que passivité, retards de langage, agitation, troubles du sommeil, troubles de la concentration et dépendance aux écrans

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