Interview exclusive des créateurs de la série belge "La Trêve"

Séries | Rencontre en exclusivité avec les trois créateurs de cette série phénomène : Matthieu Donck, Stéphane Bergmans et Benjamin d'Aoust, dans un café de Saint-Gilles.

De Pickx

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Attention, chef-d’œuvre : "La Trêve" va chambouler l’idée que vous avez des séries télé made in Wallonie. Une histoire belge, des acteurs du cru, une réalisation digne du grand cinéma. C’est la première fois que l’on peut voir une série francophone aussi exigeante, haletante et profondément noire, entièrement réalisée en Ardenne.

Une série produite par Hélicotronc et la RTBF, en coproduction avec Proximus.

Il y a quelques années, trois jeunes scénaristes bruxellois rêvaient de créer une série belge de grande envergure. Dans la même veine que "True Detective" ou "Broadchurch". Avec leur projet en béton, ils ont décroché l’appel à projet lancé par la RTBF et le Centre du cinéma. Rencontre en exclusivité avec les trois créateurs de cette série phénomène : Matthieu Donck, Stéphane Bergmans et Benjamin d'Aoust à Bruxelles.

Interview de V. N. pour Proximus TV.

"La Trêve" est diffusée sur la chaîne Movies & Series Pass et disponible dans le catalogue à la demande de Proximus TV.

Rencontre avec les 3 scénaristes de "La Trêve"

Le scénario de "La Trêve" est signé Matthieu Donck, Stéphane Bergmans et Benjamin d'Aoust. Matthieu Donck est le show runner et le réalisateur de  la série. Nous les avons rencontrés à Bruxelles, le 8 décembre, juste avant la diffusion du premier épisode sur Proximus Tv. La discussion a vite pris un tour enjoué, ponctué de rires et d’encouragements de la part d’autres membres de l’équipe : une actrice, une monteuse de la série, qui étaient là par hasard dans ce café de Saint-Gilles, venaient soutenir le trio de "La Trêve" et nous dire à quel point ils croient en ce projet. Une série qui marque un tournant dans l’histoire de la télé belge… Interview.

- (Proximus Tv) : Comment est née la série "La Trêve"?

-    Matthieu Donck :
On a décroché le premier appel à projet de La RTB et du Centre du cinéma. Au début, on rêvait. Quelle série avions-nous envie de voir ? Certainement pas un soap. On voulait faire du cinéma à la télé. On écrivait ligne par ligne, en se disant qu’on n’aurait pas l’argent pour la produire… et que ce n’était pas du tout le ton qu’ils recherchaient.
-    Benjamin d'Aoust : On était les premiers surpris par la réponse positive de la commission.
-    Matthieu Donck : Au premier rendez-vous, j’ai dit à la RTBF: « je crois que vous avez mal lu, je pense que ce n’est pas un projet pour vous », sans aucune moquerie.  » J’avais peur qu’ils me suggèrent de tourner au parc de Forest à Bruxelles, alors que nous voulions tourner en Ardenne…

Rencontre avec les 3 scénaristes de "La Trêve"

.- (Proximus Tv) : Comment est née la série "La Trêve" ?

-    Matthieu Donck :
On a décroché l’appel à projet de La RTB et du Centre du cinéma. Au début, on rêvait. Quelle série avions-nous envie de voir ? Certainement pas un soap. On voulait faire du cinéma à la télé. On écrivait ligne par ligne, en se disant qu’on n’aurait pas l’argent pour la produire… et que ce n’était pas du tout le ton qu’ils recherchaient.
-    Benjamin d'Aoust : On était les premiers surpris par la réponse positive de la commission, présidée par Frédéric Krivine.
-    Matthieu Donck : Au premier rendez-vous, j’ai dit à la RTBF: "Je crois que vous avez mal lu, je pense que ce n’est pas un projet pour vous », sans aucune moquerie". J’avais peur qu’ils me suggèrent de tourner au parc de Forest à Bruxelles, alors que nous voulions tourner en Ardenne…

Rencontre avec les 3 scénaristes de "La Trêve"

-    Comment s’est passé la collaboration à trois ?

-    Matthieu Donck :
En réalité, nous avons beaucoup collaboré sur tout le projet. On se connaissait : j’avais déjà écrit une bande dessinée avec Benjamin, "Shrimp", éditée chez Dargaud. Et avec Stéphane, nous avions écrit des films ensemble. On a donc commencé à créer la série à nous trois.

-    Quelle était l’idée de départ ?

-    Matthieu Donck : Notre idée était d’aller tourner dans l’Ardenne profonde et d’écrire une série qui se déroule en Belgique. Très vite, Stéphane a évoqué "Twin Peaks", et la manière dont David Lynch fait des champ-contrechamps en intérieur (pas très chers) et entrecoupe avec des plans de paysages et de forêts, qui donnent l’impression d’une série très aérée. Ce procédé coûte moins cher que filmer des plans avec des personnages à l’extérieur, puis à l’intérieur, puis d’aller tourner en forêt.

Rencontre avec les 3 scénaristes de "La Trêve"

-  (Proximus Tv) : Vos images magnifient l’Ardenne et ses forêts. Vous avez eu besoin d’un hélicoptère pour les plans sur la  Semois ?

-    Matthieu Donck : Nous avons utilisé des drones. Nous voulions faire du cinéma à la télé. Avec une équipe technique provenant du cinéma.
-    Benjamin d'Aoust : Plutôt que d’inventer ce qu’on appelle un high concept du même type que « Lost », on a voulu partir d’une idée extrêmement simple : qui a tué Driss Assani ? Puis est venu le principe des dix petits nègres d’Agatha Christie et du Cluedo. Chaque épisode développe de nouvelles pistes à l’enquête.

Rencontre avec les 3 scénaristes de "La Trêve"

-  (Proximus Tv) : Dès le premier épisode, il y a beaucoup de personnages riches, qui ouvrent plein de possibilités narratives…

-   Benjamin d'Aoust : C’est exact. L’une de nos références est "Broadchurch", une série nourrie par la vie des personnages et par le décor (la falaise, le village). Nous voulions montrer qu’en Belgique, on a aussi notre Far West, nos images, nos paysages (que Bouli Lanners a filmé au cinéma). On voulait éviter la Belgitude et l’humour catégorisé comme "belge".

Rencontre avec les 3 scénaristes de "La Trêve"

-  (Proximus Tv) : "La Trêve" est une série "dark". Je n’ai vu que les deux premiers épisodes, mais déjà il ressort que votre univers est peuplé de gens sombres aux visages fermés, peu avenants, avec une police désabusée, sans moyens…

-    Benjamin d’Aoust : C’est très noir ! Mais dans les épisodes suivants, le héros va rencontrer des personnages plus ouverts. Si on regarde "Broadchurch", c’est aussi dark.
 -    Matthieu Donck : Comme dans "Twin peaks", tous nos personnages ont une face cachée ; on se demande "que cache-t-il?" parce qu’on a envie de voir le côté obscur des gens. On ne montre pas la vraie vie, mais on fait un truc plus équilibré, avec de la noirceur et parfois, on se permet des pointes d’humour. Auparavant, quand on faisait une série belge francophone, c’était bricolé, un peu clownesque. Nous voulions faire une série comme celles que nous regardons, mes amis et moi : les flics devaient être de vrais flics, il n’était pas question de les faire glisser sur une peau de banane ! Ni de se rapprocher des téléfilms mièvres ou de « Julie Lescaut » au pays des Bisounous.
-    Benjamin d'Aoust : Nos références sont les séries anglo-saxonnes, scandinaves ou américaines, comme "True Detective", plutôt que "Joséphine Ange gardien".

Rencontre avec les 3 scénaristes de "La Trêve"

-   (Proximus Tv) : Qu’est-ce qui fait "une histoire belge" ?

-   Matthieu Donck : On en sait rien. Souvent en France, on me pose la question : tu as fait une histoire belge ? L’histoire de "La Trêve" aurait pu être racontée au Danemark ou aux Etats-Unis. On voulait la raconter en Belgique et filmer la Wallonie comme on la filmerait aux Etats-Unis. Prenez une histoire classique, de paysans qui veulent la terre du voisin. Qu’elle soit tournée en Amérique ou en Hesbaye, cela existe partout. Les Américains porteront des chapeaux de cow-boy, mais à part ça, l’histoire est la même.
-    Benjamin d’Aoust : Nous avons donc intégré ce qu’on appelle "l’arène" (dans le jargon des scénaristes) américaine dans la Trève. En plus, nous aimions aussi beaucoup les séries scandinaves et leur arène : leur langue, leurs acteurs… Finalement, notre rêve absolu serait que les Scandinaves regardent "La Trêve"!

Rencontre avec les 3 scénaristes de "La Trêve"

-  (Proximus Tv) : Quels sont vos espoirs pour la sortie de La trève ?

-    Matthieu Donck : On dit ça en riant, mais on aimerait avoir au moins un spectateur Danois! Je veux surtout souligner ce mouvement, cet engouement qui se passe avec les séries télé de qualité, que ce soit en Scandinavie ou en Flandre (les Flamands ont pris le train bien avant nous). Les scénaristes francophones de Belgique sont trente guerres en retard… Mais nous avons l’espoir que "La Trêve" soit bien accueillie. Je me souviens d’un article que vous aviez écrit à propos de l’audience de "Broadchurch" (diffusé sur France 2) qui parvenait à battre celle de "Joséphine ange gardien" sur une autre chaîne, le même soir, en prime time ! C’est enfin possible. On fait le pari : si vous donnez autre chose que "Joséphine ange gardien" aux spectateurs belges, ils regarderont peut-être "La Trêve"…
-    Stéphane Bergmans : Nous étions en train d’écrire la fin de "La Trêve" quand "Broadchurch" a été diffusée sur France 2. Là, je me suis dit : le public peut suivre, même si "La Trêve" est une série dans la noirceur. C’est encourageant.

Rencontre avec les 3 scénaristes de "La Trêve"

-  Il y a des touches d’humour et d’empathie. Peeters, le personnage principal, va s’ouvrir peu à peu. Dès la première scène, il est confronté à une psy, et cela ouvre vite une autre dimension…

-    Stéphane Bergmans : L’histoire de base est : qui a tué Driss ? Mais la vraie intrigue de "La Trêve" est : qui est Yoann Peeters, cet inspecteur énigmatique ? Comment-il en est arrivé là ? Que fait-il chez cette psychiatre ?

-  Et on se demande aussi qui est cette psy d’une froideur absolue, magistrale actrice.

-   Matthieu Donck : Jasmina Douieb est l'actrice qui joue la psy. C’est aussi ma compagne...
-   Stéphane Bergmans : Elle est très marquante parmi les personnages féminins. Il y a aussi la bourgmestre jouée par Catherine Salée et Anne Coesens, qui joue l’ancienne petite amie de Peeters. Et la fille de Peeters, Camille (Sophie Breyer).

Rencontre avec les 3 scénaristes de "La Trêve"

-  (Proximus Tv) : Les adolescents ont une certaine importance dans "La Trêve"?

-    Stéphane Bergmans : C’est un autre pan que nous voulions exploiter. Yoann Peeters s’installe à Heiderfeld, dans son ancienne maison,  avec sa fille Camille (jouée par Sophie Breyer). Cet inspecteur va enquêter sur la mort de Driss Assani, dans ce village où le nombre de suspects est énorme. Tandis que sa fille, ado, qui vient de Bruxelles, va devoir s’intégrer dans ce village qu’elle ne connait pas. On voulait mélanger l’histoire privée des Peeters à l’enquête de police.
-    Matthieu Donck : Le personnage de Camille a 17 ans, il se développe dès le troisième épisode et devient une intrigue parallèle à l’enquête. L’adolescente a un réseau à elle et va tenter de s’intégrer à sa façon.

Rencontre avec les 3 scénaristes de "La Trêve"

- (Proximus Tv) : Du point de vue de la temporalité vous jouez sur plusieurs niveaux.

-    Benjamin d’Aoust : Dès la première scène, le rapport entre Peeters et la psy permet de jouer avec le décalage temporel. Nous jouons avec les flash forward, qui sont des sauts en avant dans le temps. Peeters raconte à la psy ce qu’il s’est passé un mois auparavant. Le spectateur doit être intrigué par l’histoire personnelle de l’inspecteur. Son histoire sera divulguée avec l’apparition d’Inès, l’amie d’enfance (Anne Coesens).

Découvrez la bande-annonce de "La Trêve" dans ce dossier.

Rencontre avec les 3 scénaristes de "La Trêve"

- (Proximus Tv) : Matthieu, vous êtes le showrunner ?

- Matthieu Donck : Au début, je voulais juste réaliser "La Trêve". Or il fallait aussi un show runner, quelqu'un qui ait une vision globale de la série, une pensée en amont. Techniquement, cela veut dire diriger les comédiens sur le plateau,.Et gérer 520 minutes de fiction, c’est gigantesque. J’ai aussi découvert que dans le rôle de show runner, il y a une partie de production ; c’est capital. Il faut pouvoir se démultiplier, avoir une vue large et compter sur des gens qui ont la même vision que moi. Je valide tout… Cela m’a beaucoup aidé qu’il y ait un scénariste (Benjamin) derrière la caméra et un autre (Stéphane) comme scripte…

- Vous avez fait l’IAD (école belge de cinéma) ?

-  Matthieu Donck : Stéphane Bergmans et moi, avons étudié à l’IAD. Benjamin d’Aoust a fait les études d'analyse de cinéma (ELICIT) à l’ULB. En fait, on est fiers de notre série. C’est une série belge !

"La Trêve" est diffusée sur la chaîne Movies & Series Pass et disponible dans le catalogue à la demande de Proximus TV.

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