Il y a 25 ans, un pirate entrait dans la légende du Giro

Sports | Ce Giro particulièrement montagneux est pour nous l'occasion de saluer la mémoire du regretté Marco Pantani, auteur d'un fabuleux doublé Giro-Tour en 1998. "Il Pirata" laisse en héritage le souvenir d'un des plus grands grimpeurs de tous les temps. Retour sur une étape mythique où il s'est envolé, le 4 juin 1998...

De Tagtik

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C’est en 1998 que Marco Pantani tutoie de très près la légende cycliste en devenant le septième et, à ce jour, dernier coureur de l'histoire à enlever la même année le Giro et le Tour de France.

Fabuleux doublé

Un fabuleux doublé qui lui permet de rejoindre des géants du vélo, puisqu'avant le Pirate de Cesenatico, seuls Miguel Indurain (deux fois, en 1992 et 1993), Stephen Roche (en 1987), Bernard Hinault (deux fois, en 1982 et 1985), Eddy Merckx (deux fois, en 1970 et 1972), Jacques Anquetil (en 1964) et Fausto Coppi (deux fois, en 1949 et 1952) ont réussi à dompter les deux grands tours la même saison.

Marco l'outsider

Au départ de ce Giro, le grand favori s'appelle Alex Zülle car le Suisse de l'équipe Festina, rouleur-grimpeur polyvalent, est en excellente condition comme il vient de le prouver au Tour de Romandie. Marco Pantani, avec son compatriote Ivan Gotti, le Russe Pavel Tonkov ou le Français Luc Leblanc fait partie des gros outsiders de l'épreuve.

Comme attendu, Alex Zülle, maillot rose depuis le prologue, contrôle tranquillement les deux premières semaines de course, même s'il a cédé sa tunique quelques jours à l'Ukrainien Serhiy Honchar, au spécialiste des classiques Michele Bartoli, au Français Laurent Roux ou à Andréa Noe. Alors que survient la dix-septième étape, il a porté le maillot rose pendant 12 jours et semble parti pour une victoire facile. Première défaillance

Mais, entre Asiago et Selva di Val Gardena, Zülle subit une première défaillance dans les 2 cols de l'étape et perd plus de 4 minutes et demie sur un duo composé de Giuseppe Guerini et Marco Pantani. Il Pirata endosse le premier maillot rose de sa carrière et laisse la victoire d'étape à Guerini. Au général, Tonkov, Guerini et Zülle se tiennent en une minute. Un avantage trop maigre pour Pantani avec un chrono de 34 km qui se profile l'avant dernier jour entre Mendrisio et Lugano. Le lendemain, un superbe duel entre Tonkov et Pantani se termine en match nul, Tonkov remportant cette courte étape mais Pantani ne perdant qu'une petite seconde sur le Russe. Zülle, lui a déboursé une minute supplémentaire.

Une étape de légende

C'est la 19e étape, entre Cavalese et Plan di Montecampione qui va marquer le sacre de Pantani et le calvaire de Zülle, au terme d'un nouveau duel magnifique avec Tonkov. Dès l'ascension du premier col, le Goletto di Cadino, Pantani, mis sur orbite par la Mercatone Uno, lance une attaque de loin qui laisse Alex Zülle sans réaction.

Accompagné par Tonkov et deux ou trois de ses équipiers de la Mapei, le Pirate et ses lieutenants Garzelli, Conti et Velo impriment à la course un tempo d'enfer. Zülle, tétanisé, rejoindra la ligne avec une demi-heure de retard sur le vainqueur du jour.

Galvanisé par les tifosi

Pendant que Zülle pleure ses espoirs déçus, Pantani et Tonkov -séparés par 30 secondes au deux premières places du général- peuvent enfin en découdre. Après plusieurs attaques du Romagnol qui tente d'écoeurer le coureur russe, y compris en descente, les deux hommes se livrent un duel de toute beauté dans l'ascension finale du Montecampione. Usé par trois jours de guérilla incessante, Pantani est à la limite mais, galvanisé par la foule des tifosi, il met tout en oeuvre pour se débarrasser du Russe qui rechigne à prendre les relais et se contente de suivre suit le train infernal dicté par le grimpeur italien. Le démarrage d'une vie

Tout à coup, alors que les deux coureurs ont laissé sur place tous leurs adversaires et tandis que chaque kilomètre qui passe joue en faveur de Tonkov, supérieur dans le contre-la-montre, Pantani va réaliser l'irréalisable. A deux bornes du sommet, porté par la foule et une force surhumaine, Pantani place une accélération prodigieuse qui va prolonger le suspense jusqu'aux dernières heures du Giro.

Tonkov explose. Poussé par les clameurs, Marco se déchaîne, et prend près d'une minute au Russe. Pantani gagne l'étape au terme d'une des plus belles parties de manivelle de l'histoire. Deux jours plus tard, sur le chrono, Pantani fera jeu égal avec Tonkov pour s'imposer sur ce Giro 1998. Le Pirate remporte également le classement du meilleur grimpeur, termine deuxième du classement par points et deuxième du classement par équipes avec la Mercatone Uno.

Triomphe au Tour

Il décide de s’aligner au Tour. Cette Grande Boucle 1998, polluée par par l’affaire Festina, permet à Pantani de signer une autre victoire exceptionnelle aux Deux Alpes.

Une fois encore, il renverse la vapeur en un jour, dans le froid et sous la pluie, en reléguant à près de 9 minutes le maillot jaune et tenant du titre Jan Ullrich, lequel sera son dauphin sur les Champs Elysées. Déchéance

Suite à son exclusion du Giro pour paramètres sanguins anormaux, l'année suivante à Madonna di Campiglio, à deux jours de l'arrivée et alors qu'il comptait 6 minutes d'avance sur tous ses rivaux, il devient le mouton noir des années dopage.

Malgré plusieurs tentatives de retour pour effacer la honte de ce bannissement, le Pirate plonge peu à peu dans les affres du doute, de la solitude et de la dépression. Les mauvaises fréquentations et la drogue auront raison de sa santé. Le 14 février 2004, il est retrouvé mort dans le silence et l'anonymat d'une chambre d'hôtel de Rimini.

Bien loin des clameurs admiratives qui avaient accompagné son doublé de 1998...

Video : Stage 19, Giro, June 4th 1998

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