Moody Mae évoque le pouvoir de la musique live : "Rien ne peut remplacer l’énergie du public"

Musique |

Avec la nouvelle série ‘Monologue’, Proximus Pickx célèbre les talents belges installés ou émergents. Dans cette interview au format unique, les artistes se racontent pendant 10 minutes. Aujourd’hui, découvrez le collectif soul et hip-hop Moody Mae, basé à Louvain et codirigé par Roel Meulemans (33 ans). L’artiste confie sa vision musicale au micro de Proximus Pickx. 

De Pickx

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Dans votre épisode de ‘Monologue’, on peut vous voir, vous et les membres de votre groupe, en costume médiévaux dans une course poursuite. Quelle est la signification derrière cela ? 

Roel Meulemans : "On est partis de l’idée d’une sorte de paysage désertique, comme dans le film ‘Dune’. Ça devait représenter l’immensité, le fait que le monde de la musique est vaste, que les choses peuvent aller dans n’importe quelle direction. On ne peut pas toujours voir à l’avance quel sera le résultat final. Ça reflète aussi la manière de créer notre musique. On laisse notre son et notre style évoluer en fonction de ce qu'on ressent à ce moment-là. Cette idée de base a ensuite évolué lors de discussions avec l’équipe de production de la vidéo. Nous leur avons totalement fait confiance pour élaborer un scénario. 

Ce qu’on ressent également dans cette vidéo, c’est le fait que chacun doit se battre de son côté au début, mais qu’ensuite on finit par se rassembler, et c’est comme ça qu’on avance réellement. L’union fait la force, le fait d’être ensemble fait avancer. Nous voulions montrer ça aussi."

On peut aussi vous voir sur scène, avec un grand orchestre. Ce qui est plutôt rare pour un groupe de hip-hop ! Pourquoi avez-vous choisi de procéder de cette manière ? 

R.M. : "En tant que rappeur, j’ai souvent été sur scène juste avec un DJ, mais avec un groupe live, c’est un peu mieux. Il y a plusieurs raisons à ça. Lorsque je vais à un concert, la musique me touche toujours plus lorsqu’il y a beaucoup de monde sur scène. Je ressens davantage d’énergie. Ça s’explique aussi par mon affinité avec le hip-hop et le reggae de la vieille école, où les gens partent souvent en tournée avec un groupe entier. En tant qu’artiste, je pense aussi qu’il est important que d’autres musiciens puissent être sous les feux des projecteurs. Je suis à l’avant et je tiens le micro, donc le public me prête davantage d’attention, c’est normal. Mais je pense que c’est important de donner à tous une chance de briller. Ils le méritent." 

Dans un groupe aussi large, il doit y avoir beaucoup d’échange d’opinions. Quelle part de votre musique est écrite individuellement, et quelle autre partie surgit, quant à elle, lors de jam-sessions ? 

R.M. : "Il arrive parfois que, lorsqu'on joue ensemble, quelqu’un ait une idée et on la garde. Le reste du groupe y réagit, et on crée progressivement quelque chose sur cette base. Mais souvent, il nous arrive aussi de se mettre derrière l’ordinateur dans notre chambre et de faire des démos, qui doivent ensuite être traduites en quelque chose qu'on peut jouer en live et qui fonctionne bien sur l’enregistrement. On travaille donc de différentes manières."

Qu’est-ce qui vient en premier, le message et les paroles, ou le groove ? 

R.M. : "On part souvent d’un certain message, mais il se peut aussi que la musique soit prête avant d’écrire les paroles. Lorsque j’écoute de la musique ou que j’assiste à un concert, j’apprécie toujours qu’elle soit agréable à la fois pour les personnes qui veulent juste danser, et pour celles qui recherchent une valeur ajoutée dans les paroles, qui veulent vraiment comprendre l’histoire qu’on leur raconte. On part souvent d’une idée en termes de contenu pour ensuite l’habiller de musique, mais parfois c’est un concept musical fort qui nous emporte."


Le pouvoir de la musique live

Vous appelez votre genre musical du "meaningful hip-hop", soit du hip hop qui a du sens. Quels sont les sujets principaux que vous souhaitez aborder ? 

R.M. : "Ce sont généralement des choses qu'on vit nous-mêmes dans notre vie. C’est souvent lié à l’état psychologique et au bien-être mental. Heureusement, c’est un thème dont on parle beaucoup ces dernières années. On constate que c’est vraiment nécessaire d’en parler. Surtout depuis la pandémie, parce que ça a rendu les choses plus difficiles pour beaucoup de gens. Notre propre quête de bien-être psychologique est d’autant plus importante. 

Je puise également l’inspiration dans mes expériences en tant que travailleur communautaire. Je fais ce job depuis 9 ans. Je travaille avec des personnes appartenant à des minorités, des groupes cibles vulnérables, des défavorisés. J’ai vécu beaucoup de choses avec eux, beaucoup d’entre eux sont devenus des amis, voire même de la famille. Je vis leur histoire avec eux dans une certaine mesure, j’essaie de les soutenir. Certaines de ces expériences, de ces préoccupations et de ces frustrations se ressentent dans notre musique. C’est une façon de les faire résonner, de leur donner une place. Et aussi pour ouvrir les yeux des gens. Si ça peut pousser quelqu’un à se dire ‘tiens, je ne l’avais pas vu comme ça’, ça fait réfléchir et c’est une bonne chose. Pour moi, c’est souvent la tâche d’un musicien ou d’un artiste : emmener les gens en voyage vers ce qu’ils ne connaissent pas."

Vous racontez dans votre épisode de ‘Monologue’ que, parfois, des spectateurs viennent vous voir après le concert pour vous dire qu’ils s’identifient à votre musique. Est-ce que ça fait partie des moments où vous avez le sentiment d’avoir réussi en tant qu’artistes ? 

R.M. : "C’est sûr, même si nous avons aussi d’autres ambitions. Je reçois beaucoup d’énergie positive des gens qui sont en accord avec notre histoire. On essaie toujours de toucher ou d’émouvoir les gens. Quand ils disent qu’ils se sont véritablement sentis impliqués par nos paroles, c’est toujours agréable." 

Vous vous êtes faits un nom en Belgique grâce à des concours musicaux, notamment en remportant Sound Track en 2019. Quelle importance cela a-t-il eu pour vous ? 

R.M. : "Lorsqu'on a signé pour Sound Track, notre but était très clair : on voulait faire beaucoup plus de concerts. On avait le sentiment que notre musique se révélait mieux sur scène, et grâce à ces concours, on a pu jouer beaucoup plus ! Ça nous a donné l’occasion de se mettre en avant. On voulait vraiment donner encore plus en live que sur un disque. 

Aujourd’hui, beaucoup d’artistes mettent vraiment l’accent sur la production et l’enregistrement. Ils veulent que la musique passe directement de leur ordinateur à la radio, pour ainsi dire. Jouer sur scène n’a pas la même importance pour tous les artistes. Moi, je suis convaincu que tout musicien qui monte beaucoup sur scène est aussi plus fort en studio, c’est un ensemble. C’est un moyen de faire le plein de confiance en soi, de travailler sur ses compétences. 

C’est pour ça que des gros groupes comme nous bénéficient énormément de la participation à des concours musicaux. Il ne faut pas oublier que ces compétitions sont subjectives. Nous avons gagné Sound Track, mais il y avait énormément de talents en demi-finales et en finale. J’espère qu’ils ont continué à croire en eux et qu’ils produisent toujours de la musique dont ils sont fiers."

Puisque jouer en live est si important pour vous, les deux dernières années n’ont pas dû être faciles…

R.M. : "J’y repense avec deux sentiments contraires. Evidemment, on a été déçus que beaucoup de nos dates aient été annulées. La sortie de notre premier EP était prévue pour avril 2019, mais elle a ensuite été reportées plusieurs fois et, au final, on n’a pu faire un show pour sa sortie qu’en novembre 2021. Pendant les années qui se sont écoulées entre les deux, on a beaucoup travaillé et grandi en tant que musiciens. Tellement qu’on a commencé à travailler sur un nouvel EP ! On a vraiment pu investir du temps dans la création de nouvelles musiques. On a également eu la chance de devenir artistes en résidence à Het Depot. On y a eu un espace pour répéter, assez grand pour y être tous. On ne pouvait pas tout faire ensemble dans une petite pièce. Comme les concerts n’étaient pas d’actualité, on a pu réfléchir et avoir un véritable regard critique sur ce qu’on produit. On a décidé de se concentrer davantage sur la production et de s’assurer que tout ce qu’on sort en termes de mixage et de mastering est totalement prêt pour la radio. Oui, ça a été très frustrant par moment, mais on a su tirer de l’énergie du contact qu’on a réussi à conserver entre nous. Mais c’est sûr que le public nous a énormément manqué. L’énergie qu’on reçoit d’eux en tant que musicien, rien ne peut la remplacer."

Si tout se passe bien, vous avez déjà des projets pour l’été prochain ? 

R.M. : "On y travaille, mais je ne peux pas en dire énormément pour l’instant. On veut surtout se produire le plus possible, mais aussi continuer à prendre le temps de travailler sur de nouveaux morceaux. On souhaite vraiment que toute la musique qu’on diffuse ne fasse que s’améliorer. On espère être prêts à jouer en concert cet été dès que c’est possible, pour revoir le public et en tirer de l’énergie. Dans tous les cas, on se sent prêts à faire de grands pas en avant."

Découvrez l'épisode de Moody Mae pour ‘Monologue' maintenant via ce lien sur Pickx.be et via l'application Pickx.

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