“Pas de digitalisation sans l’homme.”

Publié le 23/06/2021 dans Inspiration

«Nous fabriquons l’équipement satellite qui se trouve au sol», explique Guy De Winne, vice-président des performances mondiales. «Ce projet a toujours eu pour d’accroître l’efficacité. Nous n’automatiserons jamais au point de supprimer le volet humain.»

“Pas de digitalisation sans l’homme.”

Faisant partie d’un groupe mondial, ST Engineering, basé à Erpe-Mere, produit ses propres équipements de satellites ainsi que des produits répondant à des normes de qualité élevées pour d’autres entreprises technologiques. Une activité où l’intervention de l’homme est essentielle : il n’y a pas deux produits identiques, et les volumes sont faibles. Les gains d’efficacité pour ST Engineering se situent principalement dans les processus d’entreprise. Afin de stimuler l’échange d’informations tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de l’enceinte de l’usine, l’entreprise a entamé sa transformation digitale.

« ST Engineering est un groupe mondial dont les activités sont très étendues. Nos équipements de communication par satellite sont principalement fabriqués en Belgique », explique Guy De Winne. « Auparavant, nous le faisions sous le nom de Newtec. Nous avons été l’une des toutes premières Usines du Futur en Belgique. Il y a deux ans, nous avons été repris par ST Engineering. » Depuis le site d’Erpe-Mere, Guy De Winne est responsable de la rationalisation des processus d’une vingtaine de filiales dans le monde.

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De la méthode Lean au sans papier

L’entrée dans le XXIe siècle a marqué le début de la digitalisation de Newtec. Guy De Winne : « Il y a vingt ans, la méthode Lean a fait son apparition en Europe. Nous avons été l’un des premiers à l’adopter. Vers 2005, une foule de technologies ont été développées. L’industrie manufacturière est un secteur très compétitif, nous avons donc compris que nous devions continuer à innover pour maintenir notre production en Flandre. »

L’ambition en 2005 ? Devenir une usine totalement sans papier. Guy De Winne : « C’était l’objectif de nombreuses entreprises lors de la première vague de digitalisation, au point de devenir une véritable tendance. Mais pour nous, il s’agissait d’un objectif réaliste, que nous avons atteint. SAP est devenu le cœur de nos processus et a remplacé toute la paperasserie. »

« Tout au long de notre digitalisation, la mentalité Lean est restée primordiale », explique Guy De Winne. « C’est aussi le conseil que je donne aux autres entreprises manufacturières : assurez-vous que vos processus de production sont aussi efficaces que possible avant de commencer à digitaliser. Analysez en profondeur les domaines que vous pouvez optimiser. Si vous avez trop de “déchets” dans vos processus, digitalisez-les aussi. Si vous ne comprenez pas bien comment fonctionnent votre propre production et la logique de la digitalisation, vous ne pourrez jamais éliminer ces déchets par la suite. »

Mon conseil : assurez-vous que vos processus de production sont aussi efficaces que possible avant de digitaliser.

Planification et production en temps réel

ST Engineering accueille les dernières évolutions avec grand intérêt, par ses propres moyens et avec ses propres ressources. Guy De Winne : « Nous comprenons ainsi pleinement le fonctionnement des nouvelles technologies et pouvons les utiliser de manière optimale, et ce, même pour les applications que nous n’avions pas prévues au départ. »

En assurant nous-mêmes les mises en œuvre, nous comprenons comment fonctionnent les nouvelles technologies.

La même chose s’est produite avec SAP : « Le système était facilement opérationnel, mais la planification restait un problème », explique Guy De Winne. « Pour tenir compte des fournisseurs, des clients et de notre propre capacité, nous devions encore planifier des jours, voire des semaines, à l’avance. Nous avons donc cherché un moyen de planifier en temps réel et de manière flexible. »

Guy De Winne : « Notre spécialiste SAP connaissait le site de production et nos systèmes informatiques. Il a donc pu réaliser la nouvelle planification avec les fonctionnalités de SAP. C’est ainsi que nous avons mis en place notre propre système de pilotage de la production (Manufacturing Execution System - MES). »

Vers une usine fondée sur les données

Le prochain défi consiste à centraliser et à utiliser efficacement la multitude de données. « Ces dernières années, nous avons recueilli beaucoup de données, mais celles-ci étaient dispersées dans diverses bases de données et provenaient de la production et des machines ainsi que des services de support. Nous voulions nous assurer que toutes les informations étaient centralisées dans un cube de données avec des vues différentes. Nous souhaitions ainsi que chaque collaborateur puisse facilement obtenir les informations nécessaires à son travail via cette base de données centrale »

ST Engineering a déjà franchi le premier pas de cette approche fondée sur les données. « Nous nous sommes heurtés aux limites de notre propre système et nous avons donc choisi Siemens pour établir un tout nouveau MES », explique Guy De Winne. « Pour la toute première fois, nous n’effectuons pas entièrement la transformation nous-mêmes. Mais cela ne signifie pas que nous abandonnons notre philosophie. »

Cette collaboration est une situation gagnant-gagnant. « Le MES est un projet que Siemens peut mettre en avant. Dans le même temps, nous en assurons nous-mêmes la mise en œuvre. Nous voulons pleinement saisir les tenants et les aboutissants. Avec le nouveau système, nous sommes désormais en mesure de filtrer automatiquement toutes les données centralisées et de les transmettre au bon opérateur au bon moment. Nous pouvons ainsi ajuster la production sur la base des données centralisées dans de très courtes boucles de rétroaction. »

Nous pouvons ainsi ajuster la production sur la base des données centralisées dans de très courtes boucles de rétroaction.

L’homme au centre

« Nous ne savons pas encore quelle forme d’analyse des données sera possible à l’avenir », souligne Guy De Winne. « C’est pourquoi il est essentiel que notre captation de données soit aussi précise que possible aujourd’hui. Nous devons nous assurer que les fondements de nos données sont aussi propres et corrects que possible avant de passer à l’étape suivante. Quelque 70 à 80 % des erreurs de production proviennent de ce que j’appelle des “processus corrompus”. Ces erreurs peuvent être évitées grâce à la digitalisation, à condition de pouvoir les identifier. »

« En d’autres termes, nous pouvons analyser et envoyer un feed-back quasi en temps réel lorsque quelque chose ne va pas, mais nous ne pouvons pas prédire quand cela va se produire », explique Guy De Winne. « C’est pour cette raison que nous ne pouvons pas automatiser notre production. Nous pouvons uniquement fournir aux opérateurs les informations correctes dans les plus brefs délais. Nos collaborateurs restent au centre de la production, l’automatisation ne les remplacera jamais. »

70 à 80 % des erreurs de production proviennent de “processus corrompus”. Ce sont des erreurs que nous pouvons éviter grâce à la digitalisation.

L’avenir en ligne de mire

La prochaine étape pour ST Engineering ? Capter encore plus de données et mieux les traiter. « Ma vision de l’avenir est celle d’une usine totalement connectée », poursuit Guy De Winne. « Une usine qui est en liaison en temps réel avec toute la chaîne d’approvisionnement : fournisseurs, clients et les autres sites, pour qu’à la moindre erreur de conception, nous puissions immédiatement ajuster la production. »

« Nous développons, nous aussi, progressivement notre approche fondée sur les données », poursuit Guy De Winne. « Pour rendre les boucles de rétroaction encore plus courtes, nous devons mettre au point un algorithme. Notre production est cependant très spécifique : nous fabriquons des produits sur mesure en faibles volumes. Aujourd’hui, nous n’avons pas encore de modèles prédictifs, parce que nous n’avons tout simplement pas assez de données pour cela. L’apprentissage automatique et l’intelligence artificielle pour l’analyse des données ne sont pas possibles pour l’instant. »

L’état d’esprit constitue le plus grand obstacle à un avenir connecté : nous devons instaurer une culture de la transparence.

« Pourtant, ce n’est pas la technologie, mais l’état d’esprit, qui constitue le plus grand obstacle à un avenir connecté », déclare Guy De Winne. « Lorsqu’une erreur se produit aujourd’hui, les gens ont tendance à critiquer assez rapidement. Si nous voulons passer à une chaîne entièrement connectée, nous devons instaurer une culture de la transparence. »

Quel regard Guy De Winne porte-t-il sur le passage de la méthode Lean à une approche fondée ? « La digitalisation n’est pas une fin en soi : c’est un moyen de travailler efficacement et avec plus de flexibilité. La principale leçon que j’en tire est qu’il faut faire participer les gens. Il est essentiel que vos collaborateurs comprennent que l’évolution est nécessaire. Mettez en œuvre des changements étape par étape, et à chaque victoire, vous gagnez en confiance pour aller plus loin. Je suis fier que nous ayons inclus nos collaborateurs dans notre parcours de transformation ces dernières années. »

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